Attirée par une plaquette mentionnée par le Mahj, Musée d'Histoire de l'Art et du Judaïsme, obtenue en passant de devant, je l'ai lu attentivement, appelé pour connaître les modalités et séduite par la démarche, et j'avoue le prix très abordable.
Je me suis inscrite.
Puis le jour J, arrivée bien avance avec une amie pour voir l'exposition "Chagall et la Bible", au demeurant très intéressante, qui nous dévoile un Chagall méconnu, érudit, et engagé pour l'oecuménisme, arrive 18h et la rencontre avec Yaël, plasticienne et animatrice de l'atelier.
Après les présentations indues de la dizaine de personne regroupées dans l'atelier, nous expliquons pourquoi nous sommes ici, qu'est-ce que cet atelier signifie pour nous et ce que nous y cherchons.
Sur 10, seulement trois "pratiquent", une tapissière, artisane de son métier, une dame qui fait du patchwork et qui comme moi a été attirée par les tissus en voyageant et moi. Ce qui est intéressant c'est que nous maîtrisant toutes les 3 des techniques différentes mais complémentaires.
Une surprise nous attend : une table sur laquelle sont étendus des tissus vernaculaires du monde entier. Des tissus populaires, faites par des petites mains, pendant de longs mois, de longues années.
Certaines ternies par le temps, certaines aussi belles à l'endroit qu'à l'envers, certaines lourds par le fil métallisé qui l'orne. Ce sont tous pour la plupart des vêtements d'apparats. Ou de trousseau. Ces petits trésors n'appartiennent pas au musée mais à sa directrice, passionnée par le textile. Ce moment est hors du temps, nous faisons plusieurs fois le tour de la table, pour toucher, contempler, essayer de comprendre.
Plusieurs techniques sont réunies, le bandhani, le tye and dye indien, l'ikat, pratiqué dans plusieurs régions dans le monde, le batik, le point de boulogne, le point de croix, très utilisé dans les textiles palestiniens etc....
Après cette merveille découverte nous partons "jeter" un coup d'oeil à la collection permanente du musée, je dis "un coup d'oeil" car il est très rapide. Yaël revient rapidement sur la tradition textile chez les juifs. La diaspora exerçant souvent les métiers dont les autres ne veulent pas, ceux dit impurs (comme en Inde, les teinturiers sont des intouchables), ceux si se spécialisent dans la teinture.
Par ailleurs, le textile tient sa part dans une injonction de la Torah, ne pas mélanger le vivant et le mort, le lin, et le coton. Puis il est présent dans le textile recueilli lors de la circoncision des garçons, dans la tradition, à 8 jours, puis pendant de longs moments recueillis par les mères pour les broder, les orner, et en entourer la Torah qui à leur bar-mitvah était offerts à la synagogue. Il y a aussi les taliths, et les tsitsits, dont les franges qui en dépassant des vêtements rappellent aux hommes leurs devoirs religieux.
Ainsi nous avons eu peu de temps pour admirer les nombreux chefs d'oeuvres, les Chuppah (sorte de tissu tendu sous lesquels les mariés sont unis), les tentures qui protègent la Torah de la vue, les nombreuses robes traditionnelles qui proviennent de la diaspora juive du monde entier, notamment yéménite, qui m'avait il y a quelques années déjà ébloui.
De retour à l'atelier, Yaël nous explique enfin la manière dont nous allons travailler :
- un tissu en coton, blanc, de un mètre sur un mètre. Nous pouvons en faire ce que nous voulons, voire ne pas l'utiliser en entier, l'utiliser en plusieurs parties etc.... Mais c'est la base, notre outil de départ.
A nous de voir ce que nous voulons en faire, avec notre vécu, l'idée que nous voulons porter, par rapport à notre histoire au textile.
Le challenge est lancé, les yeux se perdent dans le vague, les mains tâtant l'étoffe, et nous sommes toutes parties pour un périple "challenge" de 3 semaines !